Cet article est publié dans le cadre d’un projet de blog sur le thème « discriminations et médias ».
Découvrir ce projet d’éducation aux médias menés par l’équipe « Education aux médias » des Autres Possibles.
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Depuis trois ans, la coopérative Régalons-nous milite pour l’égalité femmes/hommes en proposant des ateliers d’éducation populaire contre le sexisme. Les élèves ont interviewé Charlotte Gautier, pour découvrir le journalisme et s’ouvrir au féminisme.
Comment avez-vous commencé à travailler sur les questions liées aux droits des femmes ?
Je ressentais qu’il y avait quelque chose qui n’allait pas, mais je ne savais pas trop dire pourquoi. Beaucoup de mes copines ont subi des agressions sexistes et sexuelles, malheureusement, c’est très courant. Donc j’ai commencé à travailler avec des associations, comme la CIMADE qui s’occupe de femmes étrangères victimes de violence. Puis j’ai atterri dans une association où on accompagnait d’autres associations sur les problématiques de stéréotypes, de sexisme, des violences faites à l’encontre des femmes. Ces expériences m’ont permis de me rendre compte que le sexisme est un phénomène de masse qui a lieu absolument partout.
Pourquoi parler d’éducation populaire féministe à Régalons-nous ?
Le but est de proposer des ateliers, des formations, des interventions scolaires (collège, lycée et primaire) et des actions de rue autour de la lutte contre le sexisme. L’idée principale est de partir du vécu des participant.e.s, de leurs expériences de vie. Pour nous, l’éducation populaire permet l’émancipation des individus et augmente leur puissance d’agir.
Comment organiser un féminisme actif en 2020 ?
Il existe déjà ! Il y a aujourd’hui plusieurs types de féminismes (éco-féminisme, l’afro-féminisme, le féminisme matérialiste,etc.). Je me situe plus sur un féminisme matérialiste et intersectionnel. Matérialiste car cela met en avant la tension entre 2 groupes sociaux (ici les femmes et les hommes) ayant des intérêts qui divergent (répartition des tâches domestiques, place dans les instances politiques, économiques…), principalement en défaveur des femmes. Et intersectionnel car cela prend en compte la situation de personnes subissant simultanément plusieurs formes de domination ou de discrimination dans une société (sexisme, racisme, transphobie, homophobie…). Je pense que le féminisme doit croiser une multitude de luttes importantes dans notre société. Par exemple, je ne peux pas aujourd’hui être féministe sans penser à la question du respect de la planète.
Quelle est la place des hommes dans les luttes féministes ?
Pour moi, les hommes subissent aussi des pressions sociales comme être viril, ne pas pleurer ou alors cacher ses émotions. Les hommes peuvent tout à fait être intégrés dans la lutte féministe tout en prenant conscience de leurs privilèges. Je ne sais pas si il y a une bonne recette pour être un bon allié aux lutte féministes… Mais ça commence déjà par ne pas parler à la place de la femme! Par exemple, dans les manifestations, les hommes peuvent s’installer en fin de cortège pour montrer leur soutien sans se réapproprier cette lutte qui appartient aux femmes et aux minorité de genres.
Peut-on être féministe même si on était sexiste avant ?
Parce qu’on a été élevé dans une société où les stéréotypes sexistes sont présents dans toutes les sphères, on a majoritairement eu des propos et comportements sexistes ou subi des situations de sexisme. Le plus important, c’est d’aller de l’avant. D’ailleurs, ce n’est pas parce qu’on est une femme qu’on n’a pas des comportements sexiste. Je pense à une formation avec une femme qui avait travaillé pendant 10 ans dans un milieu masculin, dans le bâtiment. Entre son discours de début de formation et celui de la fin, elle nous a dit, “ je me suis rendu compte à quel point pendant toutes ses années, j’ai eu des comportements sexiste. Parce que j’avais évolué dans un milieu d’homme et pour m’en sortir, j’avais repris les codes des hommes.” Donc oui, on peut être une femme et pour percer dans tel milieu, réactiver des codes sexistes, des codes de domination.
Faut-il arrêter d’utiliser les femmes à des fins publicitaire ?
Dans la publicité, le problème est la manière dont les corps vont être représentés et utilisés. Utiliser des femmes avec un corps mince, lisse et blanc est très différent d’utiliser une multiplicité de corps avec toutes leurs réalités. Je suis pour présenter des réalités qui sont très variées et qui n’auront pas d’impact sur certaines femmes, notamment des adolescentes qui vont se comparer en permanence à ces “standards de beauté”. A force, on estime que si on ne colle pas à cette image, alors on n’est pas normale, pas jolie. Je suis contre la standardisation des corps.
Que faut-il faire pour lutter pour le sexisme ordinaire ?
Il y a plein de manières de lutter contre le sexisme ordinaire. Cela qui peut passer notamment par des ateliers d’auto-défense féministe. Moi, ça m’a beaucoup aidé. Il y a plusieurs associations qui en proposent à Nantes, comme La trousse à outils par exemple, avec des ateliers de défense physique et verbale pour lutter contre les violences sexistes et sexuelles. A Régalons-nous, on propose aussi des ateliers d’auto-défense verbale à destination des femmes et des personnes transgenre qui subissent aussi du sexisme en raison de leur genre. Dans un atelier d’auto-défense, il y a plein de petits exercices de théâtre pour apprendre à se réapproprier sa place dans l’espace, à identifier notre zone de confort à poser nos limites. Dans un deuxième temps, on travaille sur des mises en situation avec pour objectif de partager toutes nos stratégies pour répondre à cette situation.
Penses-tu que ces ateliers devraient être mis en place dès le collège ?
Avant d’apprendre à lutter contre le harcèlement de rue par exemple, il faut déjà apprendre aux jeunes filles à dire ce qu’elles aiment ou pas. Au Canada, ce sont des choses proposées dans des établissements scolaires très tôt et ça change considérablement la donne. A Régalons-nous, ça nous arrive d’intervenir dans les lycées et collèges. En général c’est à partir de la 4ème, peut-être parce que c’est l’âge des premières sorties et qu’il y aussi la découverte des sexualités qui se joue à ce moment là. Mais c’est déjà un peu tard, je pense que ca devrait être beaucoup plus tôt. Il faut aussi travailler auprès des garçons en parallèle d’apprendre aux filles à se défendre. Notamment sur des sujets, comme “C’est quoi être un garçon aujourd’hui ?” ou “Apprendre à ne pas agresser” .
Quel parcours professionnel faut-il faire pour défendre les droits des femmes ?
Pour moi, il n’y a pas de parcours officiel, même s’il existe de plus en plus d’universités qui proposent des études sur cette question, qui vont jusqu’en master. Je pense que chacun.e peut faire son parcours de façon officieuse pour défendre les droits des femmes a son niveau.
Découvrir la suite du blog d’éducation aux médias sur les discriminations :
Avec le blog « Cap sur les discriminations », les jeunes se mobilisent
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