La charte de l'écriture inclusive des Autres Possibles | Les Autres Possibles

La charte de l’écriture inclusive des Autres Possibles

Après plusieurs mois de réflexion, l’équipe des Autres Possibles s’est dotée d’une charte de l’écriture inclusive. Objectif : tendre à l’égalité entre femmes et hommes dans l’écriture, et appuyer la visibilisation des femmes dans la langue.

Article publié le 29 novembre 2023
Par L’équipe des Autres Possibles

I) Pourquoi une charte de l’écriture inclusive des Autres Possibles

Les Autres Possibles, association codirigée par 5 femmes et 1 homme engagé.es contre le sexisme dans les médias à travers ses ateliers d’éducation à l’information, a recours à l’écriture inclusive depuis plusieurs années déjà dans les colonnes de son magazine et sa communication, par engagement et souci de cohérence. 

Les Autres Possibles se refuse à considérer comme anecdotique le principe de domination masculine qui s’exerce dans notre langue depuis le 17ème siècle – époque à laquelle la règle du masculin l’emportant sur le féminin a été introduite dans la grammaire française : « Parce que le genre masculin est le plus noble, il prévaut seul contre deux ou plusieurs féminins…», écrivait le grammairien Scipion Dupleix en 1651, dans Liberté de la langue française dans sa pureté. Ou encore : « Lorsque les deux genres se rencontrent, il faut que le plus noble l’emporte », affirmation de l’Abbé Bouhours en 1675. 

400 ans plus tard, cette règle est toujours en vigueur : une aberration morale qu’il est grand temps de rectifier. La langue, support de nos pensées, influence notre rapport au monde, aux autres. Et nous souhaitons que l’ensemble de nos supports d’édition participent activement à la faire évoluer.

Nous usions déjà de l’inclusif dans nos colonnes, il était temps de se doter collectivement d’une charte claire pour harmoniser nos pratiques, tout en se laissant la possibilité de la faire évoluer à mesure que nous continuerons d’expérimenter et de perfectionner notre usage de la langue inclusive, et de confronter cet usage à celui des autres. Car il en est ainsi du langage : c’est une matière vivante, évolutive, par nature sensible à “l’air du temps”, n’en déplaise à nos dirigeant·es du moment. Et nous pensons que c’est une bonne chose.  

II) Dans quels cas s’applique notre charte ?

La charte est applicable à l’ensemble de nos supports publics :
→ Notre média Les Autres Possibles
→ Nos supports de communication : newsletters, posts de réseaux sociaux, mails…
→ Nos projets d’édition : guides, expositions…
→ Nos travaux d’édition réalisés pour un commanditaire extérieur : nous ne l’imposerons pas, mais le proposerons à chaque fois, en prenant le temps de l’explication. Nous l’appliquerons naturellement en cas de “carte blanche”.
→ Nos interventions orales : nous nous engageons à y faire attention lors des interventions radio, ou encore lors des animations de table ronde.
→ Dans le cadre de l’éducation aux médias, nous proposerons aux publics bénéficiaires l’application de cette charte dans les contenus issus des ateliers, en prenant le temps de faire un point à ce sujet. 

III) Nos principes 

Une considération préalable…

Notre priorité, à travers cette charte, est d’abord de tendre à l’égalité entre femmes et hommes dans l’écriture, tout en prêtant une attention particulière à la non-binarité dès qu’il s’avère possible d’avoir recours à un terme épicène (ni masculin, ni féminin – “les personnes” par exemple). Si la non-binarité n’est pas érigée en principe premier de cette charte, c’est que Les Autres Possibles, après discussions en équipe, souhaite, d’abord, appuyer sur la visibilisation des femmes dans la langue, et fait, par ailleurs, le choix d’un compromis en sa qualité de média tous publics : nous ne souhaitons pas, pour l’instant, user de néologismes – nous parlons, par exemple, des nouvelles formes de pronoms telle que “iel” ou “ielle”. Quand bien même nous reconnaissons leur intérêt et nous laissons la possibilité d’évoluer sur ce point.

C’est ce positionnement qui guide la hiérarchie entre les principes de cette charte :

Principe N°1

AVOIR RECOURS AUX DOUBLES FLEXIONS EN PRIORITÉ

→ Pour parler d’une façon générale d’un métier, d’une fonction, ou d’un autre statut, on utilise prioritairement la double flexion à partir du moment où les deux sont possibles : “les infirmières et les infirmiers…” (on maintient donc cette règle dans le cas d’un métier pouvant être majoritairement féminin ou masculin) ; “les étudiants et les étudiantes…” 

→ Cela vaut également lorsque l’on parle d’un groupe particulier : peu importe qu’il y ait plus d’hommes que de femmes dans ce dernier, ou inversement : “les étudiantes et les étudiants de ce master en biologie…” ; En revanche, si l’on sait que les groupes en question ne sont constitués que de femmes, on parlera uniquement des “étudiantes de ce master…”

Principe N°2

AVOIR RECOURS AUX FORMES CONTRACTÉES, ENSUITE 

→ Les formes contractées désignent les formes ayant recours au point médian pour visibiliser le féminin et le masculin dans un même mot : “les agriculteur·rices” 

Leur avantage est de permettre un gain de place et de sobriété dans le texte, sans invisibiliser les femmes. Nous choisissons d’y avoir recours dès que nécessaire, si la double flexion n’est pas satisfaisante (par manque de place, ou pour tout autre raison). 

→ L’usage du point médian s’applique comme suit :
“Les instituteur·rices”
“Les vendeur·ses”
“Les étudiant·es”

Autrement dit : on utilise un seul point médian par mot. Le point coupe le mot après la dernière lettre commune aux deux terminaisons : nous ne réécrivons pas une lettre commune. Nous écrivons entièrement la nouvelle terminaison à partir de cette lettre. Et le pluriel, s’il y a lieu, est noté uniquement au bout de cette seconde terminaison, par principe de sobriété.  

Principe N°3

AVOIR RECOURS AUX FORMULATIONS DÉGENRÉES

Si après l’application prioritaire des premiers principes de cette charte, la solution de rédaction n’est pas jugée satisfaisante (perte de sens, d’exactitude, texte trop long, points médians trop nombreux), 

→ Les formulations épicènes permettent de désigner des catégories sans aucune indication de genre. Elles sont donc aussi inclusives que possible tout en permettant de limiter l’usage de la double flexion et du point médian : “les personnes présentes ce jour-là…” au lieu de “les hommes et les femmes présent·es ce jour-là” ; “l’électorat s’est prononcé en faveur de…” au lieu de “les électeurs et les électrices se sont prononcé.es en faveur de…”

Nous y aurons recours si la non-binarité est plus particulièrement souhaitée à tel ou tel endroit d’un texte, ou par souci de sobriété. 

→ Dans le même esprit, il est également possible d’avoir recours à la substitution par le groupe :
“Le directeur, la directrice” : “la direction”
“Les professeurs” : “le corps enseignant”

Ou encore de chercher une nouvelle formulation de la phrase en question, pour atteindre un équilibre moins genré.

IV) Règles complémentaires :

LES ACCORDS

→ Concernant l’accord des adjectifs et participes passés, nous remplaçons la règle du masculin qui l’emporte, par celle de la majorité qui l’emporte. Donc, s’il y a plus d’éléments féminins dans une énumération, le féminin l’emporte, et inversement. Ex. Un académicien, une journaliste et une institutrice sont engagées dans un bras de fer grammatical.
→ En cas d’égalité, nous utilisons le point médian. Ex. Un académicien et une journaliste sont engagé·es dans un bras de fer grammatical.
→ Pour l’instant, nous faisons le choix de n’appliquer cette règle qu’aux sujets humains, et dès lors qu’au moins un sujet humain est concerné. Notre usage restera inchangé concernant les autres catégories du vivant et du non-vivant.

FÉMINISER LES NOMS DE MÉTIERS, FONCTIONS, ETC. 

→ Professeure, procureure, menuisière, présidente, cheffe, cascadeuse, chasseuse… Lorsque l’on parle du métier, de la fonction, ou de tout autre statut présentant une femme en particulier, on féminise le nom en question.
→ Le choix des féminins à utiliser se fait 1/ en posant la question à l’interlocutrice pour connaître son usage personnel 2/ en se posant la question à chaque nouveau cas de l’usage que souhaite privilégier la rédaction : auteure ou autrice ? En l’occurrence, autrice !
→ Si l’interlocutrice souhaite masculiniser sa fonction, nous respecterons son choix, en l’indiquant.  

L’USAGE DES PRONOMS 

→ On applique la double flexion aux pronoms. Ex. Ils et elles ; celles et ceux, etc.
→ On utilise les pronoms neutres de type – iel, ielle, etc. – seulement sur demande explicite de l’interlocuteur·rice qui se retrouve dans ce pronom. 

L’ORDRE DE MENTION 

→ On inscrit les noms des autrices et auteurs d’un ouvrage collectif, par exemple, par ordre alphabétique.

DANS LES CITATIONS 

→ On n’applique pas cette charte à l’intérieur des citations, pour ne pas l’imposer à nos interlocuteur·rices et marquer leurs propos d’un usage qui ne serait pas le leur. Ceci dit, si une personne a fait clairement usage d’un langage inclusif lors de nos échanges, nous nous autorisons à lui proposer cette application.  

DANS LES TITRES D’ARTICLES

→ Pas de règle exclusive : on ne se ferme pas à l’idée de mettre un point médian dans un titre d’article ou de Une, au cas par cas, en fonction de notre recherche d’accroche : références, sens, etc.

L’ADRESSAGE DIRECT

→ Dans le cas de l’adressage direct, la charte s’applique dans la mesure du possible, en cherchant en priorité une formulation épicène simple. L’adressage direct concerne principalement nos textes de communication. Ex. “Venez discuter avec nous lors de cette rencontre ! » Plutôt que « Lecteurs, lectrices des Autres Possibles, venez discuter avec nous… »

Je télécharge la charte en PDF.

 

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