Mai 2022
Par Capucine Fromont, Ligère Bertin et Victor Morel
Crédit Photo : Ligère Bertin
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Quand avez vous vu, touché un violon pour la première fois ?
La musique a toujours fait partie de ma vie grâce à mon frère et ma soeur, eux aussi musiciens. Mais il y a eu ce moment, cette révélation qui a changé e toute ma vie ! Mes parents m’avaient emmené e à un concert alors que j’avais 5 ans et m’ont permis de rencontrer un des violonistes. J’ai tout de suite été fascinée par cet objet si beau et mystérieux à la fois ! La question ne se posait plus : je voulais devenir violoniste ! J’ai étudié les bases au piano et, 6 mois plus tard, je touchais le premier violon de ma vie en espérant qu’il ne me quitte plus jamais.
Qu’est ce qui vous attire dans cet instrument ?
Sa beauté, le contact avec son bois si particulier évidemment. Plus qu’une attirance c’est un attachement : c’est comme une extension de mon bras, une partie de moi même . Je leur donne un nom tellement je leur suis liée. D’ailleurs ils s’appellent tous Ernest, allez donc faire plus affectif ! Il y a quelque chose de très sentimental entre le violon et moi, c’est pour ça que j’ai toujours beaucoup de mal à me séparer d’un de mes compagnons lorsque je dois m’en séparer.
Quelle est la place du violon dans l’orchestre, qu’est ce qu’il lui apporte ?
Tout d’abord vous devez savoir qu’il y a deux sortes de violons dans l’orchestre classique : les premiers violons, composant le thème chantant de l’oeuvre ; et les seconds violons qui jouent le contre–chant et accompagnent la mélodie. Les deux sont très importants. Ils ont une vibration, une résonnance qui les place souvent au centre des thèmes.
À quoi pensez–vous pendant un concert ?
Pendant que je joue je me laisse transporter par la musique. Elle me fait ressentir tout un mélange de sentiments, de pensées ou de souvenirs comme une sorte de mélancolie. Jouer face à un public c’est un partage, une plongée dans un imaginaire collectif . Nous faisons vivre la musique mais en même temps nous sommes très vulnérables puisque nous sommes tellement dans c e partage avec le public que nous nous retrouvons en quelques sortes à nu devant le spectateur ! Après il ne faut pas oublier de doser transport et concentration, pour éviter les fausses notes…
Vous verriez vous quitter le monde de la musique aujourd’hui ?
J’y serais forcément amenée mais j’espère que ce sera le plus tard possible ! Tant qu’il me sera physiquement possible de jouer, je jouerai. Et lorsque je ne le pourrai plus, j’écouterai. Sans musique je m’ennuie… J’ espère sincèrement continuer le plus longtemps possible.
Comment décririez vous l’ambiance qui règne dans un orchestre ?
C’est assez particulier à vrai dire… On pourrait comparer ça à une famille et pourtant il ne faut pas oublier que nous sommes avant tout une entreprise. Pour moi c’est
cela faire partie d’un orchestre : vivre dans une famille-entreprise, dont il faut parfois gérer les conflits…
Pensez-vous que le violon puisse s’adapter à d’autre style de musique que le classique ?
Bien évidemment ! La musique est un langage universel c’est ce qui fait sa force. Par exemple je suis toute excitée à l’idée de jouer des musiques de films l’année prochaine ! J ’aimerai vraiment que le violon sorte de cette étiquette « bourge et chiant » ce qui est totalement faux puisque les places aux concerts sont moins chères que celles d’ un match de foot.
Quelles différences constatez vous entre le travail « solo » et celui réalisé lors des répétitions avec l’orchestre ?
La préparation en solitaire est énorme ! On se doit d’ être irréprochables . De plus lorsque l’on se retrouve avec tout l’orchestre, on travaille plus la cohésion afin de retrouver cette magie qui fait le sel de la musique. En solo, on apprend les notes avec l’orchestre on étudie le son et le ressentit. Toutefois dans les deux configurations, le travail est énorme les gens qui disent « Vous faites juste de la musique » se trompent . Je travaille beaucoup notamment pour des concours et je ne prends pas souvent de vacances.
Comment l’actualité comme la guerre en Ukraine ou la pandémie, impact e elle votre façon de jouer et votre vie d’artiste ?
L’actualité nous touche énormément dans l’orchestre. Mais notre rôle dans des moments aussi terribles est de garder espoir et de continuer à jouer. La musique c’est comme un instant de grâce durant lequel on oubli e toutes les horreurs du monde. C’est un petit moment suspendu, empli de bonheur, une sorte d’échappatoire dans lequel on peut se réfugier quelques temps. Je ne dirais pas que c’est du déni, c’est plus une aide pour tenir face aux problèmes de la vie, un so utien ; comme toutes les formes d’art.
Quelles est votre définition d’un artiste ?
Question compliqué… Pour moi un artiste c’est quelqu’un qui partage des émotions avec son public, qui vous transporte dans l’ imaginaire et qui vous fait ressentir des choses. Pour moi l’art, c’est ressentir et faire partager ce ressenti.
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