Jeanne Lelièvre : “Grâce à ma brodeuse numérique, j’ai donné vie à mes dessins” | Les Autres Possibles

Jeanne Lelièvre : “Grâce à ma brodeuse numérique, j’ai donné vie à mes dessins”

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Un beau jour, dans un fablab, Jeanne Lelièvre a fait une rencontre. Le chemin de l’illustratrice a croisé celui d’une machine : la brodeuse numérique. Ses illustrations se sont alors misent à danser, à courir, à flotter dans l’air au gré des mouvements de ceux dont elle “tatoue” désormais les vêtements. 

Publié le 7 juillet 2022
Par Marie Bertin
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Chaque numéro des Autres Possibles est illustré par un·e artiste nantais·e différent·e. L’occasion de découvrir le travail des graphistes, illustrateur·rices et peintres locaux, mais aussi d’en apprendre plus sur leurs parcours et leurs inspirations dans une interview menée chez eux ou dans leur atelier, et publiée ici après la sortie de chaque nouveau numéro.

Comment une illustratrice, fan de gravure, se retrouve-t-elle derrière une brodeuse numérique ?

Après m’être installé à Nantes, en 2018, j’ai fait un service civique au sein de l’association d’expérimentation numérique Ping. C’est dans leur Fablab que j’ai découvert la brodeuse numérique. Ça a vraiment été une révélation. Grâce à cette machine – qui permet de broder un motif à partir d’un fichier image -, je pouvais utiliser mes propres illustrations pour les reproduire en broderie.

J’ai trouvé ça génial. C’était comme leur donner vie, les matérialiser. Je pouvais toucher mes dessins ! Dans un premier temps, j’ai gardé cette rencontre dans un coin de ma tête sans rien en faire. Je n’étais pas encore prête à me lancer à ce moment-là. Mais environ un an plus tard, je me suis acheté une machine similaire et j’ai commencé à expérimenter… et j’ai créé Les Broderies du Tatou dans la foulée. J’ai ouvert un compte Instagram, un site… et je me suis mise à broder pour les gens, sur commande.

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Comment cela fonctionne-t-il ? Tu brodes uniquement tes propres dessins ? 

Ce sont toujours mes dessins oui, mais ce sont des illustrations personnalisées en fonction des demandes de mes commanditaires. C’est vraiment comme un boulot de tatoueur, en fait. Les gens viennent et me demandent si je peux leur broder tel paysage, tel animal, etc. Et c’est parti.

C’est du sur-mesure : pour un t-shirt, un sweat, un tote bag, une fripe… Parfois, on vient aussi me voir pour des logos. J’ai brodé les tabliers d’une boulangerie, d’un magasin de vélo, par exemple. Mais ça reste ponctuel.

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Une de tes spécialités c’est aussi de broder lors d’événements…

Oui, je peux aussi broder en direct pendant un festival, un concert, des rencontres… C’est encore un exercice différent. Dans ce cas, j’ai un catalogue de dessins à disposition et les gens choisissent directement dedans.

Car il faut que les broderies soient réalisables en une trentaine de minutes maximum. J’emmène un petit stock de vêtements, mais les gens peuvent aussi me donner leur veste, leur t-shirt, ils me précisent l’endroit où ils veulent la broderie et reviennent les chercher 30 minutes plus tard.

La broderie numérique, c’est une histoire sérieuse pour toi ? 

Oui, je compte bien poursuivre sur ma lancée ! Mais à l’avenir, il va falloir que je démarche davantage et que je me fasse conseiller pour le développement. J’aimerais broder en collaboration avec d’autres marques aussi.

Après, je ne veux pas cantonner mon travail à la broderie pour toujours. L’idée, c’est de créer tout un univers entre broderies, fresques, romans graphiques, illustrations, tatouage, gravure… La gravure a été un sacré coup de foudre et je compte bien y revenir.

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Gravure et broderie, ce sont pourtant des styles très différents…

La broderie a changé mon style. Je ne pouvais pas broder des dessins trop précis, avec de nombreux traits comme c’est le cas en gravure. Donc j’ai dû apprendre à simplifier. Pour les Autres Possibles, justement, j’ai dû revenir à ce trait “gravé”. Et ça m’a plu.

Mais les deux genres ne sont pas non plus opposés. Pour moi, le point commun, c’est un rapport très matériel au trait. J’aime les dessins faits artisanalement, manuellement, avec de la texture, du papier… Beaucoup plus que le digital où tout est toujours très propre et lisse. 

Jeanne Lelièvre
© Jeanne Lelièvre

Tes dessins, qu’ils soient gravés ou brodés, font souvent référence au monde animal…

C’est vrai. J’aime particulièrement les humaniser, leur donner un côté créature, créer un monde autour. J’ai toujours été fascinée par la nature. C’est aussi pour ça que la gravure m’a attirée d’emblée. Avec son trait noir et nervuré, elle permet de restituer le côté grouillant, souple, ondulant de la nature.

Je maintiens ce lien en broderie grâce aux représentations animales, mais c’est vrai que mon trait de brodeuse est beaucoup plus “professionnel”, alors que mon trait de coeur, celui qui me fait vibrer, c’est le noir, le gravé. 

Jeanne Lelièvre
© Jeanne Lelièvre

Le parcours de Jeanne Lelièvre, en bref →

Après un parcours en Sciences et Technologies du Design et des Arts Appliqués au Lycée privé d’Avesnières, à Laval, Jeanne se lance dans le BTS Design graphique (Print) de l’École Estienne, à Paris. Elle y découvre la gravure et décide de s’y consacrer en rejoignant la section Images imprimées des Beaux-arts de Bruxelles, d’où elle sort diplômée en 2017. Elle effectuera ensuite un stage de lithographie à l’imprimerie Idem à Paris, avant de revenir vivre en Pays de la Loire, à Nantes, où elle achève sa formation par une alternance d’un an en Design graphique multimédia. Elle crée Les Broderies du Tatou en 2020.

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