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Une pépinière pour préparer les arbres au réchauffement climatique

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Dans la pépinière de l’ONF de Guéméné-Penfao, on prépare les forêts du futur : celles qui devront résister aux nouveaux aléas climatiques, en particulier aux sécheresses.

Article publié en juin 2021, mis en ligne le 25 janvier 2023
Par Hélène Bielak
Photographie : Jean-Felix Fayolles
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Sous une grande serre lumineuse, des centaines de petits chênes semés au coeur de cet hiver se tiennent au garde-à-vous dans leurs godets individuels. Ces arbres en devenir sont des chênes sessiles de Provence et des chênes pubescents du Sud-Ouest. Leurs glands ont été sélectionnés dans ces régions du Sud pour leur résistance au manque d’eau. « Ils portent forcément en eux l’adaptation à un environnement plus stressant », souligne Olivier Forestier, responsable de la pépinière de l’Office national des forêts (ONF) de Guémené-Penfao.

Une génétique de compet’ pour se préparer à la montée des températures. Ces chênes resteront deux ans à la pépinière avant d’être plantés dans des forêts partout en France. « L’objectif est qu’ils s’hybrident avec des arbres locaux pour que les forêts deviennent peu à peu plus résilientes face au changement climatique », explique le responsable. Des chênes ont ainsi été plantés dans la forêt de Verdun, mais aussi en Loire-Atlantique, à Abbaretz et Saint-Vincent-des-Landes. Voilà ce qu’on appelle, dans le jargon de l’ONF, de la « migration assistée » du sud vers le nord de l’Hexagone.

PINS GRILLÉS

Cette mission d’adaptation des forêts s’inscrit dans le cadre d’un programme lancé en 2011, le bien nommé Giono*. Depuis, elle est devenue centrale pour la pépinière de Guémené-Penfao créée il y a 53 ans. L’enjeu est considérable : assurer la régénérescence des forêts. Selon l’ONF, dans les seules forêts publiques françaises qui représentent un quart des massifs forestiers, 300 000 hectares présentent des dépérissements importants depuis 2018, soit 7% de la surface. La moitié de ces espaces pourraient voir leur aspect profondément modifié d’ici 50 ans. En plus des sécheresses récurrentes, la hausse des températures moyennes favorise le développement de nuisibles qui ravagent de nombreuses essences. Par exemple, la graphiose, un champignon transmis par les scolytes, des coléoptères, a décimé la population d’ormes en France depuis les années 1980.

 

DES RACINES ET DES GRAINES

D’autres bouleversements sont moins visibles mais non moins inquiétants, selon Olivier Forestier : « Les arbres ont tendance à produire moins de graines, avec un taux de germination plus faible. Et les graines qui réussissent à se transformer en jeunes plants ont de fortes chances d’être “tondues” par le gibier, dont la population a beaucoup augmenté ces dernières années*. Cette pression du gibier enlève toute possibilité de régénérer la forêt. La seule solution, c’est d’intervenir sur place. » Justement, pour pallier le manque de semences naturelles, l’ONF a mis en place des vergers à graines. À La Chapelle-Heulin, huit hectares de pins maritimes sélectionnés pour leur capacité reproductive et leur résistance au manque d’eau ont été plantés pour en collecter les graines. En 2023, des chênes pubescents devraient les rejoindre. La pépinière s’occupe aussi de la conservation des ressources génétiques forestières.

Elle possède une collection d’arbres de référence au niveau national sélectionnés pour leurs qualités, comme la robustesse face à certains envahisseurs et fournit des plants aux scientifiques qui veulent développer les connaissances sur ces espèces. Car, comme le rappelle Olivier Forestier, « une des clefs de l’adaptation future réside dans la biodiversité d’aujourd’hui

* Jean Giono est l’auteur de L’homme qui plantait des arbres.
* La Fédération nationale de chasse décomptait 30 000 sangliers tués par an dans les années 1970, contre 800 000 aujourd’hui.

 

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