Dans le vignoble, le parcours d'Anne, maraîchère, de l'AMAP au SUPER U | Les Autres Possibles

Dans le vignoble, le parcours d’Anne, maraîchère, de l’AMAP au SUPER U

Anne Belleil
Ferme de Sabotchka
Gétigné – 25 Octobre 2016
Stéphane Mahé / Le Map

Anne Belleil, installée comme maraîchère à Gétigné, près de Clisson, depuis 2006 a savamment choisi et expérimenté sa distribution. Aujourd’hui elle associe circuits courts et grande surface… Et a trouvé chaussure à son pied.

Paru en décembre 2016
Par Mathilde Chevré
Photo : Anne Belleil, productrice de légumes bio depuis 2006 à Gétigné. (Stéphane Mahé/Les Autres Possibles)
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Pudique mais vive, Anne Belleil n’est pas femme à se taire. Son éloquence naturelle éclaire les traits de son visage. Il y a dix ans tout pile, cette fille de producteurs laitiers quitte la restauration pour investir dans la terre. Elle choisit une nature de sols épargnés par l’agriculture intensive et proche sur le plan agronomique de sa Bretagne natale. Quatre hectares de champs et de prairies rebaptisés Ferme du Sabotchka : « je voulais entrer dans la filière bio car elle nous permet, à nous producteurs, de nous adapter aux évolutions de la société et d’innover dans la commercialisation ». Dès son installation en 2006, la maraîchère boude la criée des marchés et les centrales d’achats qui « fragilisent les producteurs avec des prix négociés à la baisse ». Elle choisit de vendre ses paniers de légumes sur Internet. Mais l’option montre rapidement des limites. Le consommateur, pas toujours régulier dans ses achats, génère trop d’invendus, ce qui l’oblige à faire affaire avec les grossistes du Marché d’Intérêt National (MIN) de Nantes pour le rachat des légumes. Les yeux rieurs de la productrice se voilent lorsqu’elle évoque des rapports de forces « permanents » et « une économie de marché violente où la marchandise est en concurrence directe avec celle des autres maraîchers. Les producteurs ne représentent rien ! ». Anne n’est pas femme à s’embarrasser, elle renonce à ce système.

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Force et collectif

Dès 2007, année de son premier employé en CDI, elle livre ses légumes en AMAP à Clisson, Le Longeron et à Nantes quartier Zola. C’est encore à ce jour, pour la maraîchère, l’assurance de planifier ses ventes : « À Zola, avec soixante personnes sous-contrats, je gagne 600 euros pour une heure et demi de distribution. » Pour cause de « rigidité du bureau associatif », elle quitte l’une d’entre elles, déçue. Il lui en coûte 30 000 € de pertes, un quart de son chiffre d’affaires à l’époque. Elle adhère alors en 2009 au réseau Manger Bio 44, et approvisionne désormais quatre restaurants scolaires. Elle s’illumine : « les équipes de cuisine viennent ici, on parle, et quand il y a un problème on le règle ! Une valeur ajoutée pour tous. »

Le circuit court : distribution dans lequel intervient au max un intermédiaire entre le producteur et le consommateur. (Stéphane Mahé/Les Autres Possibles)

« Elle appelle donc « au culot » le responsable du Super U du quartier ! »


De l’AMAP au Super U

Même si la productrice se retrouve dans ce mode de fonctionnement, elle s’impatiente. Pour elle le bio n’a pas vocation à rester confidentiel : « on peut faire plus, il faut capitaliser sur la filière du maraîchage Bio, augmenter les volumes et faire baisser les prix ! » Sans renoncer au circuit court, en 2014, elle appelle donc « au culot » le responsable du Super U de Gétigné, qui « cherche du bio local ». Système U est une des rares enseignes de la grande distribution à être constituée en coopérative de commerçants. Anne peut donc négocier ses prix directement avec le gérant, et le livrer, sans passer par une centrale. Mais qui dit supermarché, dit contraintes de rayonnage ! Réaliste, Anne investit 5 000 € « vite amortis! » dans une chaîne d’emballage et d’étiquetage à la ferme. « Aujourd’hui au Super U de Dalby par exemple, on est en flux tendu, avec deux livraisons semaine et zéro invendu! » En se diversifiant, la productrice a trouvé son équilibre. Désormais, Anne distribue 55 % de sa production en Super U du coin, 35 % en AMAP et 10 % en restauration scolaire. Elle emploie trois salariés à l’année, et se dit qu’un jour, sa filière, tout comme ses choux, fera le poids ! ♦

 

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