Sur son site, Reporterre retrace tous ces petits empêchements qui ont bloqué le texte : la dissolution de l’été 2024, le gouvernement Barnier, qui chute en quelques mois, puis le gouvernement Bayrou, qui préfère en repousser l’examen. Prévu pour mars 2025, il a brusquement disparu de l’agenda du Sénat, avant d’y être réinscrit. De quoi donner le temps à certaines marques d’organiser la contre-offensive… Le média Cm-cm.fr, spécialisé dans la seconde main, a révélé que Shein s’était rapproché de député·es en amont du vote à l’Assemblée, et rappelle que le site s’est offert les services de Christophe Castaner, ancien ministre de l’Intérieur, en l’intégrant à son comité responsabilité sociale et environnementale (RSE), et de l’ex-conseiller ministériel Thomas Urdy, pour gérer les « affaires gouvernementales », autrement dit : le lobbyisme. Épaulées par le groupe Havas et ses agences spécialisées en communication de crise et en « batailles culturelles » – entités de la galaxie Bolloré –, de vastes campagnes font la part belle au greenwashing et instrumentalisent la lutte des classes avec un manifeste qui promet une mode durable et accessible, et qui assure soutenir l’objectif ambitieux d’une telle loi.
Ne nous y trompons pas : cette loi couplée à la refonte de l’Union douanière européenne – qui prévoit le rétablissement de droits de douane pour les colis d’une valeur de moins de 150 euros expédiés depuis les pays hors UE – peut noircir l’horizon de la fast-fashion. Du moins, le rendre un peu moins radieux. Mais Stop fast-fashion estime que le texte a d’ores et déjà été « vidé de sa substance » par la Commission de l’aménagement du territoire et du développement durable du Sénat. En cause, entre autres, la redéfinition de la fast-fashion en fonction du nombre de modèles, et non plus du nombre de vêtements fabriqués : une façon plus ou moins habile de cibler les géants de l’ultra fast-fashion tout en épargnant d’autres enseignes françaises ou européennes comme Decathlon, La Redoute, Zara, C&A…